Pour indications utiles à résoudre les travaux pratiques accédez: Instructions et Interpretations.
Notions introductifs
Les données de survie représentent le temps écoulé entre le début du suivi d'un sujet jusqu'à l'apparition d’un événement prédéfinit, ou l'âge du sujet auquel l'événement se produit. (par exemple, le temps écoulé entre le diagnostic du cancer de l'ovaire et le décès, le délai entre la chimiothérapie dans le lymphome de Hodgkin et la rechute)
L'analyse des données de survie est une collection de processus statistiques pour le traitement des données de survie.
Les données de survie nécessitent une analyse statistique différente des données quantitatives, car elles ont quelques particularités. Il y a donc des informations incomplètes (par exemple, les sujets qui n'effectuent pas l'événement prédéfini à la fin de l'étude (par exemple, la guérison / la mort)). Les informations incomplètes sont appelées informations censurées. De plus, la distribution des données de survie n'est pas normale. La censure et l'anomalie de la distribution des données de survie nécessitent des méthodes statistiques appropriées pour leur analyse correcte.
Les données de survie sont décrites graphiquement par des courbes de survie. La méthode de représentation la plus utilisée est la méthode de Kaplan Meier. La courbe de survie montre comment varie la proportion de patients vivants (ou qui n'ont pas atteint l'événement prédéfini (décès / guérison, ...) au fil du temps. Cela commence avec 100% des survivants au début de l'étude, et ce nombre diminue avec le temps.
Pour décrire la survie «moyenne» des sujets dans un groupe, on utilise le temps médian de survie (puisque les données ne sont pas distribuées normalement).
Afin d'évaluer s'il existe une différence entre la survie d'un groupe et celle d'un autre groupe, le test du log-rank est utilisé (le plus souvent, d'autres tests sont utilisés dans certaines situations).
Pour prédire le temps de survie en fonction des différentes caractéristiques des sujets (par exemple stade tumoral, type histologique, ...) la régression de Cox est utilisée (le plus souvent, mais il existe d'autres méthodes). La régression de Cox est aussi utilisée pour savoir si une caractéristique des sujets influence la survie, et si oui, combien, et dans quelle direction (la prolonge ou la raccourcit). Ainsi, la régression de Cox est utile pour évaluer l’existence et l'importance du lien entre un facteur pronostique et la survie.
Pour évaluer l'importance de l’effet d’une caractéristique sur la survie on utilise le taux ou ratio du hasard (HR - hazard ratio). Le taux du hasard est calculé en fonction du hasard.
Le hasard est le risque instantané d'un sujet à atteindre l’événement prédéterminé, étant donné qu'il a survécu jusqu'au présent (ex. le risque instantané de mourir pour un sujet ayant un mélanome malin). Plus le hasard est élevé, plus le risque de mourir (ou de réaliser un autre événement prédéterminé) est élevé (par exemple, une personne qui conduit la voiture après avoir consommé de l'alcool présente un hasard d’avoir un accident de voiture plus élevé qu'une personne qui conduit la voiture mais n’a pas consommé de l’alcool).
Le ratio du hasard d'un groupe de sujets par rapport à un autre groupe de sujets représente le rapport des hasards des deux groupes de sujets (le hasard des sujets avec un adénocarcinome de poumon, par rapport au hasard des sujets avec un cancer du poumon épidermoïde)
Dans ce travail pratique, vous allez pratiquer la description des données de survie, tester la différence entre différents groupes de sujets en termes de survie, et évaluer l'importance de l'effet de certaines caractéristiques auprès le temps de survie.
Scenario d’étude - exemple
Protocole d'étude
Pour répondre à ces questions, il faut lire les différentes sections (spécifiées pour chaque question) de l'article intitulé Effect of mitoxantrone on outcome of children with first relapse of acute lymphoblastic leukaemia (ALL R3): an open-label randomised trial, auteurs
Parker C, Waters R, Leighton C, et al. publié dans le Lancet. 2010 Dec 11; 376(9757): 2009–2017. http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3010035/
- But et objectifs (Abstract et dernier paragraphe de l' Introduction )
But: Évaluation de l'efficacité de la mitoxantrone par rapport à l'idarubicine chez les enfants atteints de leucémie lymphoblastique aiguë dont la maladie a récidivé sous les schémas thérapeutiques actuels.
Objectifs de l'étude:
- comparaison de la survie globale entre la mitoxantrone et l'idarubicine chez les enfants atteints de leucémie lymphoblastique aiguë dont la maladie a récidivé dans le cadre des schémas thérapeutiques actuels
- comparaison de la survie sans progression entre la mitoxantrone et l'idarubicine chez les enfants atteints de leucémie lymphoblastique aiguë dont la maladie a récidivé avec les traitements actuels
- Domaine de recherche: évaluation d'une approche thérapeutique
- Type de l’étude: (Methods)
- En fonction des objectifs de l’étude:
- Analytique (on applique de tests, o fait de comparaisons, on cherche de liens, associations);
- En fonction des résultats ciblés / de l'intervention du chercheur sur les sujets et l'évolution de la maladie étudiée):
- Expérimental (le chercheur intervient en administrant des préparations pharmaceutiques pour influencer la progression de la maladie);
- Selon le design:
- Avec des groupes parallèles (chaque sujet est assigné à un seul groupe tout au long de l'étude: mitoxantrone vs idarubicine);
- · En fonction de l’objectif de l'essai:
- Essai d'efficience thérapeutique / essai pragmatique (essai réalisé dans des conditions similaires à celles de la vie actuelle, y compris les problèmes éventuels de compliance des patients aux traitements);
- · En fonction de l’hypothèse clinique:
- Essai de supériorité (l’hypothèse de l'essai est que la mitoxantrone est supérieure à l'idarubicine);
- · Selon la phase de développement du médicament:
- Essai de phase IV (phase de pharmacovigilance / post-commercialisation - après l’approbation des deux médicaments sur le marché.)
Selon les méthodes utilisées pour assurer la validité de l’etude en évitant les erreurs systématiques (biais) et les facteurs de confusion (confounders):
- Essai randomisé: Les sujets ont été assignés au hasard (aléatoire / randomisé) aux deux traitements comparés. ”open-label randomized trial”
- Essai avec allocation caché („allocation concealed” - la personne qui a introduit les sujets dans l’étude ne savait pas quelle intervention recevrait le patient - Randomisation et masquage qui permettait la dissimulation des allocations - Randomisation and masking ”which enabled allocation concealment”);
- Essai en intention de traiter: tous les patients ont été analysés dans les groupes auxquels ils ont été randomisés (l’analyse était en « intention de traiter » à„intention to treat analysis” - que ce soit mitoxantrone ou idarubicine, même si les patients ont pris tout le traitement ou s'ils l'ont interrompu, les patients ont été analysés comme s'ils avaient pris le traitement correctement);
- Essai ouvert (open label): La méthode aveugle (blind/masking) n'a pas été utilisée - le patient et l'investigateur savaient ce qu’il recevait à „open-label randomized trial”;
- L'essai a été contrôlé (le traitement évalué a été comparé à l'idarubicine).
- Population cible, accessible et échantillon d'étude (Methods)
Population cible
- Caractéristiques cliniques (par exemple la maladie, le stade de la maladie, les complications, l’état fonctionnel): des patients en première rechute de leucémie lymphoblastique aiguë qui n’ont pas reçu une greffe de moelle osseuse après leur première rémission complète
- Caractéristiques démographiques (restrictions d'âge, sexe, statut socio-économique, régions géographiques): Enfants («Patients âgés de 1 à 18 ans»)
Population abordable / accessible
Patients de 22 centres participants du Groupe pour enfants et leucémies (CCLG) du Royaume-Uni et de l’Irlande. En novembre 2006, neuf centres du groupe d'hématologie / oncologie australien et néo-zélandais (ANZCHOG) ont rejoint l’étude.
Échantillon de l'étude
Critères d'inclusion
Patients âgés de 1 à 18 ans lors de la première rechute de leucémie lymphoblastique aiguë n'ayant pas reçu de greffe de moelle osseuse lors de la première rémission complète
Critères d'exclusion
Ceux qui ont une leucémie lymphoblastique aiguë B-mature
La taille de l’échantillon:
Les chercheurs ont calculé le minimum requis pour cette étude en fonction des considérations suivantes: 80% de puissance pour détecter une augmentation de 10% (90% vs 80%) dans MRDlo à TP1 entre les bras randomisés en utilisant un niveau de signification de 5% pour un test bilatéral avec un temps d’emploi de 6-7 ans. Ainsi, ils ont calculé que 219 patients seraient nécessaires dans chaque branche de l'étude.
- La façon dont les données sont collectées
- Selon la population enquêtée : Par échantillonnage (une partie de la population cible est étudié);
- Selon la durée de la collecte des données: Longitudinal, prospectif (l'information est recueillie par suivi des sujets au fil du temps: à l'entrée de l'étude puis après une période de temps pour enregistrer l’évolution du statut des patients);
- Selon la composition du ou des groupes étudiés: ~ Échantillon représentatif - série de patients consécutifs (un échantillon de patients avec les mêmes caractéristiques / critères d'inclusion qui ont fidèlement copié les caractéristiques de la population dont il a été extrait. Cet échantillon représentatif a ensuite été randomisé aléatoirement, donnant naissance aux deux groupes comparés: le groupe/ branche expérimental et le groupe/ branche de contrôle).
- Définition de l'effet étudié et des variables associées
Effets étudiés:
Les principaux effets étudiés comprennent:
La survie sans progression était le principal résultat / effet suivi. La survie sans progression était définie comme le temps écoulé entre la randomisation et la première insuffisance d’induction (5% de blastocytes ou plus dans la moelle osseuse lors de la première évaluation, persistance des blastes du LCR, non-régression de l'élargissement testiculaire), rechute, mort d’aucune cause ou une deuxième malignité.
La survie globale était un résultat / effet secondaire suivi. (défini comme le temps entre la randomisation et la mort pour une cause quelconque.)
Les variables étudiées (seules les variables pertinentes au scénario proposé à résoudre sont mentionnées)
Variables qualitatives (attribut): type de traitement, statut de la censure.
Variables de survie : délai de progression de la maladie, temps de survie.
7. Plan de description et d'analyse des données (seules les méthodes de description et d'analyse des effets et des variables suivies aussi dans le scénario proposé comme exercice sont mentionnés)
Plan de description des données
- Pour les variables qualitatives: tableaux de fréquence;
Plan d'analyse des données
Analyse par tableaux ou figures de la relation entre les variables:
- Les auteurs de l'étude ont utilisé les graphiques de Kaplan-Meier pour montrer l'évolution de la probabilité de survie dans le temps, en fonction du traitement.
Analyse statistique en fonction de ses objectifs :
Evaluation de l'effet thérapeutique
- Log-rank test - pour comparer la survie des deux lots étudiés;
Quantification de l'efficacité thérapeutique (seulement s'il y a un effet thérapeutique statistiquement significatif)
- Estimateurs et intervalles de confiance (IC 95%) des indicateurs médicaux pour quantifier l'efficacité thérapeutique:
- Rapport / ratio du hasard (hazard ratio) : HR, obtenu par régression de Cox.
- La probabilité de survie à 3 ans pour la survie sans progression, respectivement la survie globale
- Temps de survie médian
Outils analytiques utilisés: logiciel STATA version 7 (StataCorp, College Station, Texas, États-Unis)
Résultats obtenus dans l'étude. Analyse de données et leur présentation
Suite à l'application des critères d'inclusion et d'exclusion imposés dans le plan d'étude, sur les 239 potentielles participants entrés consécutivement dans l'étude et évalués, seulement 216 étaient éligibles et ont été randomisés dans les deux groupes étudiés (voir Figure 2 de l'article).
L’étude a démontré que les groupes randomisés ont eu des caractéristiques comparables (voir le tableau 2 de l'article - pourcentages similaires, valeurs médianes similaires).
La durée médiane de suivi (median follow-up) était de 41 mois dans les deux groupes (95% CI 34-48).
À trois ans, le taux de survie globale était de 57,1% (IC 95%: 49,5-63,9), respectivement, le taux de survie sans progression était de 50,3% (IC 95%: 42,9-57,3). Le groupe recevant la mitoxantrone a eu un taux de survie global de 69,0% (IC 95% 58,5-77,3) (voir Figure 1), soit un taux de survie sans progression de 64,6% (IC à 95% 54). 2-73,2) et le groupe recevant l'idarubicine: 45,2% (IC 95% 34,5-55,3) et 35,9% (IC 95% 25,9-45,9) respectivement.
Fig. 1 L’évolution de la survie globale comparée chez les enfants atteints de leucémie lymphoblastique aiguë recevant du mitoxantrone (bleu) et de l'idarubicine (rouge)
Le test log-rank pour comparer la survie globale a fourni un p = 0,0004, respectivement pour comparer la survie sans progression, un p = 0,004.
Après l'analyse multivariée de Cox (avec ajustement pour l'effet d'autres variables de confusion), le ratio du hasard (mitoxantrone vs idarubicine) pour la survie globale a été de 0,56 (IC 95% 0,36-0,87), p = 0,01, respectivement 0,54 (IC à 95% 0,36-0,82), p = 0,003.
Interprétation des résultats. Discussions
Interprétation statistique
Temps de suivi médian - 50% des sujets ont été suivis pendant au moins 41 mois, et 50% des sujets ont été suivis pendant moins de 41 mois.
La proportion de survie globale à 3 ans pour le groupe mitoxantrone - 69% des sujets ayant reçu de la mitoxantrone à 3 ans étaient encore vivants.
La différence dans la proportion de survie globale à 3 ans entre le groupe traité par mitoxantrone et le groupe traité par idarubicine: 69% - 45,2% = 23,8% - parmi les sujets ayant reçu de la mitoxantrone 23,8% de plus étaient encore en vie à 3 ans par rapport aux sujets ayant reçu de l'idarubicine.
La proportion de la survie sans progression à 3 ans pour le groupe traité avec la mitoxantrone: dans 64,6% des sujets ayant reçu la mitoxantrone, la maladie n'a pas progressé à 3 ans.
Le test log-rank pour comparer la survie globale - il existe une différence statistiquement significative entre la survie globale chez les patients traités par mitoxantrone et ceux recevant l'idarubicine (car p = 0,004 0,05, nous rejetons l'hypothèse nulle et acceptons l'hypothèse alternative. H0 : il n'y a pas de différence statistiquement significative entre la survie globale de ceux qui ont reçu la mitoxantrone et ceux qui ont reçu l'idarubicine. H1: il existe une différence statistiquement significative entre la survie globale de ceux qui reçoivent la mitoxantrone et ceux qui reçoivent l'idarubicine).
Taux du hasard pour la survie globale, estimateur ponctuel - le hasard que le groupe recevant la mitoxantrone atteigne l'événement prédéterminé (la mort) était 0,56 fois plus grand que le hasard du groupe traité a l'idarubicine, après ajustement pour l'effet des autres variables. Puisque 0,56 est inférieur à 1 et que l'événement par défaut est négatif (la mort), le groupe recevant la mitoxantrone a eu une meilleure chance de survie que le groupe de l'idarubicine. Ce résultat est un estimateur ponctuel, c'est-à-dire qu'il représente d'une part la valeur du hazard ratio dans l'étude (sur les données collectées), mais d'autre part c'est aussi la meilleure estimation de ce qui se passe dans la population cible. (si l'échantillon est représentatif).
Le hazard ratio pour la survie globale, l'intervalle de confiance - la vraie valeur du hazard ratio dans la population cible est situé entre 0,36 et 0,87 avec une probabilité de 0,95.
Appréciation de la precision du hazard ratio en ce qui concerne la survie globale – pour évaluer la précision nous regardons la largeur de l'intervalle de confiance - entre 0,36 et 0,87. Nous pouvons considérer la plage entre 0 et 1 comme une plage comprise entre 0% et 100%. La valeur 1 signifie qu'il n'y a aucune différence dans le hasard des deux groupes. Ainsi, les valeurs proches de 1 indiquent de petites différences de hasard entre les groupes, et les valeurs déviées de 1 indiquent de grandes différences. Ainsi, 0,87 est situé à 13% de 1 (100-0,87 = 13), respectivement 0,36 est situé à 64% de 1. Nous pouvons considérer l’intervalle entre 13% et 64% relativement large, donc le résultat est relativement imprécis.
Interprétation clinique
La différence de la proportion de survie globale à 3 ans entre le groupe traité par la mitoxantrone et celui traité par l'idarubicine était de 69% - 45,2% = 23,8%. Une proportion de 23,8% plus de sujets vivants est un résultat cliniquement important (proportion de décès évitables).
Le ratio du hasard pour la survie globale, l’estimateur ponctuel - 0,56 suggère une réduction de presque une moitié du hasard dans le groupe recevant mitoxantrone par rapport au groupe recevant idarubicine. Nous pouvons également regarder le résultat sous la forme d'une différence de 44% par rapport à la valeur 1. Donc, nous pouvons considérer que ce résultat est cliniquement important.
Le ratio du hasard pour la survie globale, l'intervalle de confiance - une extrémité de l'intervalle de confiance est située à 13% de 1, et l'autre à 64% de 1. 64% est relativement important. Pour 13%, au départ, nous pouvons penser que ce n'est pas très important, mais si nous prenons en compte qu’on parle du risque de décès, nous pouvons considérer que 13% est cliniquement relativement important. Ainsi, les deux extrémités de l'intervalle de confiance étant cliniquement importantes, nous pouvons considérer que l'intervalle de confiance entier est cliniquement important.
Conclusion de l'étude
Mitoxantrone par rapport à l'idarubicine chez les enfants atteints de leucémie lymphoblastique aiguë dont la maladie est récidivée sous les schémas thérapeutiques actuels offre un avantage en termes de survie globale et de survie sans progression, statistiquement significatif et cliniquement important.
À retenir
Les données de survie représentent le temps écoulé entre le début du suivi d'un sujet et le moment où un événement prédéfinit se produit.
Puisque les données de survie ne sont pas normalement distribuées et que le phénomène de censure existe, il faut utiliser la médiane et les graphiques de type Kaplan-Meier pour la description, le test log-rank pour la comparaison, et la régression de Cox avec le hazard ratio pour la prédiction.
Le hasard est le risque instantané d'un sujet de réaliser l'événement prédéterminé, étant donné qu'il a survécu jusqu'à ce moment-là, étant inversement proportionnel à la survie.